Comment nos poilus sont-ils morts?

Publié le par Paddygenéalo

Cela fait un moment que je pensais à faire cette petite analyse sur l’origine des décès des poilus dont j’ai parcouru les fiches en les indexant sur Mémoire des Hommes. En fait, c’est surtout en parcourant ceux du Burkina que j’y pensais.

Avant le centenaire, avant cette indexation, j’avais comme tous ceux de ma génération(1) quelques idées reçues sur la guerre de 14 : Verdun, les tranchées et les monuments aux morts. Je connaissais Vimy, je connaissais la clairière de Rethondes(2), et c’est à peu près tout. J’avais aussi entendu parler de l’assassinat de Sarajevo(3) qui aurait précipité le monde dans la guerre. Et bien sûr je savais, sans bien l’imaginer, que, rien que pour la France, la saignée avait été d’un million et demi d’hommes.

Seulement, ces hommes, je ne les connaissais pas. D’abord j’en ai trouvé quelques-uns dans mon arbre généalogique, contemporains de mes grands-parents, et leurs cousins, plus ou moins proches. Je l’ai déjà évoqué ici. C’est comme ça que j’ai découvert le « défi un jour un poilu » consistant à indexer ce million et demi de fiches, une pour chaque(4) soldat « Mort pour la France ». J’ai commencé par quelques lieux avec lesquels j’ai un lien : là où sont nés mes grands-parents, ou leurs parents à eux.

Et puis, je me suis fixé deux objectifs : d’une part ceux de l’arrondissement de Douai et d’autre part ceux venus de l’actuel Burkina Faso. Question de liens personnels. Pour ceux du Nord, j’ai consulté leur fiche matricule, du moins quand elle existe puisque les classes postérieures à 1906 de l’arrondissement de Douai, qui dépend du centre de recrutement de Cambrai, ont été transférées au centre de Valenciennes-Douai, c’est-à-dire à Valenciennes où beaucoup de registres ont été détruits par faits de guerre. Entre ce qui est indiqué sur la fiche Mémoire des Hommes et ce que l’on trouve sur la fiche matricule, on a assez souvent un résumé de la vie du soldat, succinct bien sûr mais au moins n’est-ce pas qu’un nom. Pour ces nordistes, et puisque ce sont ceux qui ne sont pas revenus qui m’intéressent ici, la cause du décès reste assez souvent « tué à l’ennemi » avec parfois quelques détails, sur la fiche matricule. Ajoutons les suites de blessures et les « disparitions » et on a le plus grand nombre. Et puis quelques « maladie contractée en service » sans que l’on sache toujours ce que cela signifie vraiment. Tout juste peut-on se demander comment tant d’hommes dans la force de l’âge ont pu succomber ainsi. Sans doute faut-il penser aux conditions de vie, et d’hygiène, dans les tranchées.

Ensuite, il y a ceux du Burkina. Ce qui frappe, c’est la fréquence des morts de maladie, pour ne pas dire leur prédominance. Beaucoup de ces soldats venus d’Afrique sont morts à l’arrière, à Fréjus notamment. Et le plus souvent de « maladie pulmonaire ». Avec le recul, et les connaissances d’aujourd’hui, il est facile de se dire qu’ils n’étaient pas préparés à affronter le climat, qui plus est dans des conditions de guerre. Le fait est qu’une part importante des pertes des unités coloniales est due aux maladies. Mais on ne doit pas non plus ignorer que les tirailleurs furent aussi envoyés en première ligne, en particulier au Chemin des Dames, et aussi lors de l’offensive finale qui scella la défaite allemande. Toujours est-il que la maladie reste la première cause de décès parmi les soldats du Burkina.

Inutile de s’étendre beaucoup plus : les deux graphiques ci-dessous montrent la répartition par grande cause de décès des soldats morts au cours de la guerre (ou juste après). Dans chacun une catégorie (parmi les divers pour l’autre) est spécifique : le naufrage pour les Burkinabè et la captivité pour ceux du Nord.

Comment nos poilus sont-ils morts?Comment nos poilus sont-ils morts?
  1. Un de mes grands-pères était de la classe 1919 et y a donc été, l’autre, de la classe 1921, était juste trop jeune mais ses deux frères ont fait toute la guerre, et sont revenus.
  2. Rethondes, j’y suis allé avec l’école, pour le « voyage de fin d’études primaire ». Je comprends mieux aujourd’hui ce que cet endroit représentait pour nos maîtres.
  3. Bon, l’attentat qui à lui tout seul provoque la guerre, je n’y crois plus… C’est bien sûr beaucoup plus complexe, même si la folie de quelques-uns, pourtant cousins, y est pour beaucoup.
  4. En pratique, il en manquait, il en manque sans doute encore et d’un autre côté les doublons ne sont pas si rares.

Publié dans 14-18

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