Un autre bagnard, pardon, un communard!
Celui-là, j'avais très peu de chances de le trouver. A vrai dire c'est ma soeur qui l'a eu dans une liste de bateliers mais rien ne prouvait qu'il puisse y avoir le moindre cousinage.
Il existe, même si sans surprise, c'est très lointain. Mais pas tant que çà aux standards généalogiques puisqu'il s'agit d'un cousin au 4e degré de mon arrière grand mère Alice Blasseau (1871-1943). L'ancêtre commun, unique parce que celui-ce a eu deux mariages et que le bagnard descend de la première épouse et nous de la seconde, est François Watteau (1704-1792), aka sosa 436. Oui, c'est ancien et jamais Leon Gambier, le fameux bagnard, ne serait dans mon arbre si je n'avais pas fait cette recherche spécifique. D'ailleurs à ce jour, il n'est dans aucun arbre(1) (sauf le mien depuis peu) sur Geneanet, y compris dans celui qui référence ses nombreux frères et soeurs et où on peu noter un trou vers 1851, année de naissance de Léon.
Dossiers aux ANOM ( http://anom.archivesnationales.culture.gouv.fr/osd/?dossier=/collection/bagne/H3380/&first=FRANOM58_078MIOM0572_0285&last=FRANOM58_078MIOM0572_0286&title=Registre%20matricules%20:%20H3380$%20Gambier,%20L%C3%A9on$%20Territoire%20:%20Nouvelle-Cal%C3%A9donie )
Nous voilà donc avec un certain Léon Gambier, fils d'Emile et d'une certaine Elisa Voitot. Mais c'est bien sûr, ce "Voitot" n'est autre que la transcription versaillaise de Watteau, car c'est bien connu: le parisien, fût-il versaillais, est définitivement fâché avec le W. Ah cette habitude de mal prononcer le Wé en Vé... J'avoue que des façons d'écrire les noms de bateliers, j'en ai vu, mais là ce Voitot n'est pas loin d'établir un record.
Evidemment, une recherche d'un couple Gambier Voitot ne donne rien. En revanche avec Watteau, on trouve plusieurs entrées, dont une avec une dizaine d'enfants mais pas de Léon.
Qu'à ne cela tienne, y a qu'à chercher. En principe, oui, car le dossier dit que notre communard bagnard est né à Arbrère en Belgique. C'est là qu'intervient ma fidèle table des communes, téléchargée il y a fort longtemps de Geonames. En général, le commune est vite identifiée, même quand son nom a été un peu écorché. Mais là, rien à faire, impossible de trouver.
Je sèche et laisse la nuit porter conseil. Ce qu'elle ne fait pas vraiment. Alors je longe les rivières Belges. Pourquoi pas la Meuse? Mais non aucune commune qui ressemble à ce Arbrère. L'Escaut? Pas mieux. Rien ne va. Il faut donc trouver une autre source que ce dossier à la mode versaillaise dont on a déjà vu la façon d'écrire Watteau.
Et là, une idée: le dossier dit qu'il est domicilié à Saint-Denis, qui est par ailleurs un lieu de résidence assez courant pour les bateliers du Nord dès cette époque. Et coup de chance: il existe des archives municipales en ligne qui proposent une belle variété de ressources. Malheureusement, aucun recensement exploitable pour cette période. En revanche, une autre ressource, peu commune sur un site municipal, est disponible: les listes de conscrits de la ville. Bingo!
Aucune doute possible, c'est bien lui: on lui a noté une "déportation perpétuelle", et sa mère est cette fois une Wattiaux ce qui est plus habituel.
Et voilà qu'il n'est plus né en un lieu au nom inconnu et bizarre mais à Saint-Ghislain, que toute la généalogie batelière du Nord connaît évidemment. Il n'y a plus qu'à aller vérifier cela sur le site des archives belges, le nouveau.
De là, il suffit de remonter les générations pour arriver à notre très ancien ancêtre commun qui était déjà, au XVIIIe siècle batelier de Condé. Il n'est pas impossible que nous ayons d'autres ancêtres communs mais peu importe, un seul lien me suffisait ici.
Il s'évadera, avec d'autres condamnés mais sera repris et à nouveau condamné pour cela.
Ensuite, Léon est mort là bas, le 29 septembre 1878. Il y a un cimetière des communards morts au bagne, je n'ai pas trouvé de liste de noms. Peut-être y est-il.
Contrairement à un autre cousin éloigné, Louis Delannoy évoqué ici il y a quelques années, aucune transcription. Il est vrai que si l'administration a cherché sa commune belge de naissance, elle n'a pas dû aller bien loin. Et à Saint-Denis, je n'ai rien trouvé.
Et voilà comment Léon Gambier, communard et de famille batelière, est sorti de l'oubli.
Note: comme bien des bagnards Léon est décédé à la presqu'île Ducos et certains, notamment sur Geneanet, référencent "Ducos" comme lieu de décès des bagnards. En fait, Ducos n'est pas une commune et c'est donc, administrativement parlant, un lieu-dit de Nouméa.
(1) En fait, après vérification il figure dans quelques arbres référençant les bagnards avec parfois sa filiation telle qu'elle figure dans son dossier (mère Voitot). En revanche il n'est pas dans les arbres à pure vocation généalogique.