Oubli chez « mes » poilus

Publié le par Paddygenéalo

J’ai été pris d’un remord. Et si j’avais oublié, l’autre jour, parmi mes ascendants et leurs frères, l’un de mes oncles(1) plus ou moins proches morts pendant la guerre de 14 ?

De fait mes grands-pères sont presque passés au travers, l’un était né en 1901, sa classe aurait été appelée en 1919 ou 1920 si la guerre avait encore duré. L’autre, né en 1899 a été appelé avec la classe 1919 au début de 1918. Il y a donc été, il en est revenu.

Leurs pères étaient trop âgés. D’ailleurs l’un de mes arrière-grands-pères est décédé vers 1914, sans lien avec la guerre. L’autre a vécu jusqu’en 1956 mais était né en 1869, tout juste assez âgé pour ne pas être appelé. Il en manque deux, direz-vous. En effet, j’en étais aux pères de mes grands-pères, restent ceux de mes grand-mères. Achille Groulez, né en 1870 n’y est pas allé. Henri Lassère, né en 1873, non plus.

Parmi les grands oncles, trois y sont allés, et en sont revenus. Je n’ai en tout que quatre grands oncles, le dernier est né en 1904. Par chance pour elles, mes grands tantes sont nées avant que ceux qui nous gouvernent n’invoquent l’égalité des sexes pour les envoyer, elles aussi, à la boucherie.

Ensuite, il faut passer aux arrière-grands-oncles, plusieurs y sont allés mais la plupart étaient trop âgés, voir déjà décédés en 1914. Ils y ont connu des sorts divers, mais sont revenus, presque tous. L’un, l’oncle Adolphe c’est-à-dire aussi l’époux de la tante Jeanne, seule de sa génération que j’ai connue, fut fait prisonnier à Maubeuge au tout début de la guerre (j’ai d’abord pensé qu’il avait eu de la chance, j’en suis moins sûr compte tenu du nombre de ceux qui sont morts en captivité) et n’est rentré qu’en 1919. Deux de ses frères furent aussi mobilisés, l’un, personnage quelque peu sulfureux, semble avoir navigué entre les lignes tandis que l’autre, Fernand Blanchart, est mort à Lille en 1920, à l’hôpital militaire mais son nom a été gravé sur un monument aux morts, celui de Rosendael. Je n’ai pas encore pu déterminer son statut mais il n’y a pas de fiche pour lui sur Mémoire des Hommes et sa fiche matricule a disparu. Il faudrait enquêter à son sujet et peut-être, pour lui aussi, constituer un dossier à l’ONAC : je n’en suis pas encore là.

Parmi ceux qui restaient et étaient plus ou moins en âge d’être mobilisés, il ne me restait que les frères de mon arrière-grand-père Achille Groulez, lequel était l’aîné de la fratrie. Et c’est là que je trouve l’oubli… Si Léon-François en est revenu, sa fiche matricule m’apprenant qu’il est mort à Paris en 1931, Georges Désiré Groulez est mort à Toul le 19/09/1917. Sur la fiche de Mémoire des Hommes, il est dit mort pour la France. Pourtant, il ne semble figurer sur aucun monument aux morts. Son décès a été transcrit à Montreuil-Belfroy en Anjou : je ne comprends pas pourquoi car si sa fiche matricule indique qu’il a été recensé au bureau d’Angers, tout son parcours ensuite le place dans le Nord ou à Paris. Achille passe aussi par Montreuil-Belfroy, en 1899 selon sa fiche matricule. Très vraisemblablement parce qu’ils ont tous deux travaillé à la tréfilerie de Marchiennes et que la même société avait un établissement là-bas. Ou bien parce qu’ils y avaient de la famille, un de leurs oncles, Aldemar Lesoin étant agriculteur dans le Maine et Loire (mais lui aussi, peut-être avait-il suivi le chemin de la tréfilerie).

Oubli chez « mes » poilus

J’ai essayé de retracer le parcours des frères Groulez, première génération à s’éloigner de Marchiennes, et parfois assez loin puisque Léon François est signalé à Buenos Aires en 1908. J’y reviendrai une autre fois, puisque c’est bien Georges Désiré qui m’intéresse ici. En réalité, je ne sais pas grand-chose non plus de lui : il est né le 27/03/1876 à Marchiennes et est mort le 19/09/1917 à Toul, à l’hôpital. Entre deux, je sais qu’il est passé par le Maine et Loire puisque c’est à Angers qu’il a été recensé par les autorités militaires. Ensuite, il repasse par Marchiennes où il se marie en 1905. Sa fiche matricule nous apprend qu’il a résidé à plusieurs reprises à Paris, dans le 13è arrondissement, rue Pinel, c’est même la dernière ligne avant sa mobilisation, la précédente le situant à Sin-le-Noble, dans le Nord cette fois.  Je ne lui ai pas trouvé d’enfants.

Sa fiche matricule nous en dit un peu plus sur son parcours militaire : il a effectué son service du 16/11/1897 au 23/09/1900. Presque trois ans, on ne plaisantait pas à l’époque. Il a été versé au 2è régiment d’artillerie de marine à Brest avant d’être libéré avec un certificat de bonne conduite, certificat qui était en général accordé aux conscrits qui avaient normalement rempli leurs obligations. En 1914, lors de l’ordre de mobilisation générale, Georges Désiré a obtenu un sursis qui a été renouvelé avant d’être annulé le 10/02/1915. Il est alors versé au 109è régiment d’artillerie lourde où il est maître-pointeur. Enfin, le 15/10/1915 il est affecté au premier groupe d’aviation puis à l’école d’aviation de Cazaux à compter du 07/01/1916. Il est réaffecté au 3è groupe d’aviation le 09/03/1916, à l’escadrille 117. Ensuite, plus d’indication jusqu’à son décès de la diphtérie le 19/09/1917, à l’âge de 41 ans. Bien que ses états de service dans l’aviation soient mentionnés sans ambiguïté sur sa fiche matricule, Georges-Désiré Groulez ne figure pas dans la base des personnels de l’aviation. Un oubli ? Qui sait s’il n’a pas croisé l’oncle Jean(2), lui aussi passé par Cazaux mais en juin 1916.

Oubli chez « mes » poilus

Voilà, Georges-Désiré Groulez, dont je n’ai découvert l’existence qu’à un âge relativement avancé ne figure pas dans la base des personnels de l’aviation, il n’est inscrit sur aucun monument aux morts, il n’a selon toute vraisemblance pas connu les tranchées, il est décédé à l’hôpital de la diphtérie, mais il est bel et bien « Mort pour la France » 

 

  1. Je ne parle pas ici des cousins de mes grands-parents, ni de ceux de leurs parents car si j’ai trouvé plusieurs d’entre eux, il est probable que d’autres manquent encore car il n’est pas si facile de retrouver la descendance d’un ancêtre, surtout assez récent.
  2. Jean appartient à ma branche paternelle, Georges-Désiré à la branche maternelle. Il n’y a donc aucun lien familial entre eux à l’époque où ils sont passé, sans doute à quelques mois d’intervalle, au même endroit.

 

Publié dans 14-18, Généalogie

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