La quête de l’oncle Jean (3)
J’avais, en 2016, publié ici deux posts intitulés « la quête de l’oncle Jean », 1 et 2. Voici enfin la suite. Mais disons le sans attendre, pas la fin…
Dans l’article précédent, il y a plus de deux ans, je rapportais des informations qui m’avaient été transmises par une personne qui avait pris contact avec moi après avoir vu le tout premier post. Il s’agit d’une parente de Germaine Rocher, épouse Castéra. Elle se faisait écho, notamment de sa propre tradition orale familiale selon laquelle Jean a été assassiné. Je n’en ai pas la preuve mais tout, à ce stade, me porte à croire que cette thèse est bien la bonne !
J’ai toujours entendu dire dans ma famille, et notamment par mon grand-père que Jean avait « disparu ». Depuis peu, je connais la date exacte de sa mort. Et même le lieu.
Encore une fois, c’est la mise en ligne des fiches matricules de Paris qui vient d’apporter un nouvel élément. Et pourtant, cette information, j’étais allée la chercher moi-même aux Archives de Paris en juillet 2017. Mais de ma visite dans le XIXè arrondissement, je n’avais rapporté que les fiches matricules de mon grand-père et de son autre frère, Louis(1). Pour Jean, on n’avait pas voulu me communiquer le registre au motif qu’il serait en trop mauvaise état(2) ! J’avais aussi consulté la table de succession de l’avenue Félix Faure, qui ne m’avait pas appris grand-chose d’ailleurs. Ainsi le mystère Jean était-il resté entier.
Mais cette semaine, sa fiche a été mise en ligne.
Le métier inscrit ici (agent de publicité) est une surprise, qui ne cadre guère avec ce que j’avais trouvé jusqu’ici, que ce soit à son mariage à Rouen ou dans sa participation à l’usine qui fit faillite à Douai. Il semblait plutôt travailler dans le secteur de la brasserie. Mais soit, agent de publicité. Encore faudrait-il savoir ce que cela signifie vraiment.
La fiche confirme son passage à l’aviation pendant la guerre, comme mitrailleur. Il finit la guerre adjudant. Son frère Louis, est alors sous-lieutenant. Son futur associé, Frixon, est lui lieutenant. Mais la partie de la fiche consacrée aux adresses successives ne mentionne pas de passage à Douai où se situait la fameuse entreprise qui fit faillite.
On le retrouve à Neuilly en 1927, et à sa dernière adresse, 197 avenue de Neuilly(3) (aujourd’hui avenue Charles de Gaulle) dès 1930. C’est un immeuble cossu, un peu dans le genre de celui de l’avenue Félix Faure. Mais bien sûr rien ne dit s’il habitait sous les toits ou dans les étages plus riches…
Et puis, il y a cela.
Cette fois, il n’y a plus de doute possible : Jean n’a pas disparu, il est mort. Et en 1933… Je ne peux m’empêcher de penser que sa mère est, elle, décédée en 1935. Mais pourquoi donc sa tombe est-elle à Flers-en-Escrebieux (Pont de la Deule) et pas à Douai. J’avais pensé que c’était à cause de Jean, car l’entreprise était située de ce côté-là. Mais non. Il doit y avoir une autre raison, et je crains que plus personne ne puisse la donner.
Pour Jean, on peut encore avancer un peu : les archives de Paris n’ont pas cette interprétation frileuse qui interdirait de mettre en ligne tout ce qui a moins d’un siècle et donc les décès de 1934 sont accessibles.
Il est donc décédé à paris, dans le 13è et précisément 59 boulevard Arago. L’immeuble qui se trouve à cette adresse aujourd‘hui est trop récent pour que ce soit celui où Jean est mort. Je n’ai pas trouvé ce qui pouvait bien se trouver là en 1933, mais je ne désespère pas.
Alors, a-t-il vraiment été assassiné ? Impossible de conclure : il faudra aller consulter les archives de la police mais cela va demander une certaine organisation. A priori, c’est accessible, il faut juste que je prenne le temps d’y aller. Ah ce serait plus simple d’être retraité !
J'ai aussi espéré en apprendre un peu plus en consultant la table des successions de Neuilly (vue, qui est en ligne. Mais hélas, elle ne contient pas d'élément probant si ce n'est qu'elle parle de scellés et indique que l'actif a été absorbé par des "frais privilégiés" (si je lis bien). Au moins, cela explique le dénuement dans lequel se trouvait sa veuve à la fin des années 50, et pourquoi sa fille a probablement été recueillie par ses grand-parents dans la région de Rouen. Mais pourquoi les frères de Jean l'ont-ils ignorée? A moins que ce soit la famille de sa veuve qui ait décidé de l'éloigner de la famille de son père. Après tout, si la fin de Jean est aussi sulfureuse qu'on peut l'imaginer, ça se comprend.
Le mystère de la disparition de Jean n’est donc pas encore résolu. La thèse de l'assassinat me paraît de plus en plus plausible, mais pourquoi l'avoir caché? Et mon grand-père, savait-il? Avait-il choisi de ne pas savoir, ou d'oublier... L’enquête va se poursuivre.
- Ces fiches étaient moins attendues mais restent intéressantes bien sûr. Elles apportent les informations que je souhaitais connaître, plus une anecdote sur mon grand-père qui m'a enfin expliqué pourquoi lui jouait aux courses sur son journal alors que Louis, son frère, était un véritable flambeur.
- On voit sur la fiche de Jean des réparations qui en effet laissent penser que l'on a restauré ce registre avant de le numériser
- Les curieux pourront rechercher l'adresse sur Google Maps ou Mappy (ou un autre site...) Je l'ai fait et ai donc pu constater que j'étais passé bien souvent devant cet immeuble situé à proximité de l'ancien terminus du métro à "Pont de Neuilly"
PS: on pourra se demander pourquoi je poste tout cela... Le rédiger me permet de structurer, et puis, sait-on jamais, il existe peut-être quelque part des descendants de Jean qui n'en savent pas plus.