Après l'article du Monde

Publié le par Paddygenéalo

Eh bien voilà, la « Team 1J1P » a eu les honneurs du Monde(1), et pas un entrefilet, non, une pleine page. On a beau avoir participé sans penser à une reconnaissance, juste pour le plaisir et la satisfaction personnelle d’apporter sa petite pierre à un édifice plus grand, c’est tout de même bien agréable de se retrouver ainsi dans les colonnes du plus prestigieux quotidien national.

L’article décrit assez bien les motivations variées de ceux qui ont contribué, chacun à son rythme, à cette indexation qui semblait au départ un objectif lointain, et peut-être même inatteignable. Et pourtant, nous touchons au but.

D’ailleurs la fin de l’article évoque bien le nouveau défi qui se présente à la « team » avec ces fiches oubliées, celles qui ne sont associées à aucun nom figurant sur un livre d’or ou un monument aux morts. Pour celles-là, seul un travail de fourmi, avec le parcours systématique de la base de données, permettra d’achever l’indexation.

J’ai déjà évoqué ici le cas de ceux qu’on appelle « tirailleurs sénégalais »(2), et d’ailleurs l’article du Monde les cite aussi.

Mais ne négligeons pas les autres, ceux que l’on a complètement oubliés. Un jour ou l’autre, j’essaierai de comprendre pourquoi il y a au cimetière de Douai toute une section de tombes de soldats russes. J’irai peut-être aussi voir celles de deux travailleurs chinois qui reposent à Cuincy. Et je n’oublierai pas non plus les travailleurs indochinois morts à Douai, rue d’Arras, au numéro 44 que j’ai un peu de mal à situer mais qui ne doit pas être loin de l’actuel IUFM et donc de « mon » école autrefois connue comme école annexe de l’école normale.

Leur cas mérite qu’on s’y attarde un peu car il illustre bien ce que sont ces dernières fiches de la base Mémoire des Hommes, celles qui auront échappé aux indexations systématiques. Je les ai trouvées par hasard, du moins la première. C’est d’abord un nom dans la table décennale des décès de Douai en 1919 qui m’a interpellé : il s’agissait clairement d’un nom asiatique, à première vue chinois, ce qui ne pouvait me surprendre puisque je connaissais déjà les sépultures de Cuincy et plus généralement ces travailleurs chinois. Pourtant, l’acte de décès, que l’on trouve dans le registre de Douai, dit le défunt indochinois. Et là, surprise… Car je n’avais pas encore entendu parler d’un corps de travailleurs indochinois. Du coup, j’ai cherché dans les tables et ai trouvé encore quatre de ses compatriotes décédés à Douai, tous sauf un rue d’Arras et le dernier à l’hôpital, place Maugin. Tous, sauf un, ont été inhumés à Douai : il faudra aller localiser ces tombes, probablement dans le carré militaire(3).

Après l'article du Monde

Si cet acte est au nom de Kouo Kin Piao, il n’y a aucune sépulture à ce nom dans la base de Mémoire des Hommes. Alors, comme je l’ai fait souvent pour les Burkinabè, j’ai essayé les variantes et même la recherche des noms contenant une partie du nom tel qu’il est indiqué. Mais je n’ai trouvé qu’un Ny Kin Piao, mort à Douai le 02/08/1919 alors que l’acte de décès au nom de Kouo Kin Piao est daté du 13/04/1919. Et en effet, il y a un acte de décès au nom de Ly Kin Piao à cette date, et je vais admettre qu’il s’agit bien de la même personne. On ne connaît donc pas la sépulture de Kouo Kin Piao, dont on peut tout de même supposer qu’il fut inhumé à Douai.

Après l'article du Monde

Cet acte de décès illustre assez bien les imprécisions auxquelles on est confronté avec les soldats, et donc ici les travailleurs, appelés de fort loin pour participer à l’effort de guerre. Cet homme est dit « travailleur chinois » mais né en Cochinchine (c’est-à-dire plutôt dans le sud de l’actuel Vietnam).

A ce jour, j’ai trouvé cinq travailleurs qui sont décédés à Douai en 1919 et 1920.

Les noms des personnes, comme ceux des lieux sont ici écrits tels qu’ils ont été transcrits dans les actes de décès. J’ai aussi gardé les pays tels qu’indiqués à l’époque.

 

  1. Edition datée du 24 janvier 2018
  2. Plus particulièrement ceux du Burkina évoqués sur plusieurs pages ici 
  3. En l’occurrence, il s’agit de civils et on peut craindre qu’ils aient été inhumés ailleurs que dans le carré militaire, auquel cas, il serait bien possible que les tombes aient disparu

Publié dans 14-18

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