I comme Ils sont revenus

Publié le par Paddygenéalo

J’ai vainement cherché un cousin, même fort lointain dont le nom aurait commencé par « I », ou dont cette lettre serait l’initiale du lieu de décès pendant cette guerre. Mais rien ne se proposait, et puis soudain ce fut une évidence : c’était l’occasion d’évoquer ceux qui y sont allés et en sont revenus.

Il est vrai que face à l’immensité des pertes, face à ces cimetières militaires que l’on ne peut manquer lorsque l’on traverse les régions où le front a plus ou moins stationné de 1914 à 1918, on pense à ceux qui sont tombés. Pourtant, même si leur nombre reste insupportable, plus nombreux encore sont ceux qui sont revenus.

Mais où s’arrêter ? En allant jusqu’aux cousins que l’on connait au sens généalogique, j’en trouverais plusieurs dizaines, et encore ne les ai-je pas tous repérés. Il faut bien se fixer une règle : je citerai donc aujourd’hui les grands-oncles. Il se trouve que je ne les ai pas connus.

Commençons donc par les deux frères de mon grand-père : Jean et Louis Castéra. Jean, je l’ai déjà évoqué ici : pour tout le monde, y compris dans la famille de son épouse, il a disparu. Ce mystère là, je ne l’ai toujours pas résolu. Mais en ai-je envie ? Si c’était vraiment la cas, j’aurais été depuis longtemps à Vincennes consulter son dossier militaire, sans attendre que les archives parisiennes le mettent enfin en ligne. Pour l’instant, de sa guerre, je ne connais que ce que dit sa fiche des personnels de l’aéronautique, laquelle m’a déjà mis sur la piste de sa belle-famille et du coup aussi de sa fille dont je n’avais jamais entendu parler. Cette simple fiche ouvre énormément de pistes : outre celle de la famille, elle indique une affectation à la 15è section de COA (Commis et Ouvrier militaires d’Administration) ce qui est en soi surprenant car cette section était attachée au 15è corps d’armée, région Provence Corse. Ensuite, Cazaux, Avord ce qui est plus normal pour l’aviation et une mention « Mission Russie et Roumanie » : s’agit-il de la Mission Berthelot ? Décidément bien mystérieux, cet oncle Jean qui « a disparu » . Reste Louis : je n’ai pas non plus consulté son dossier militaire mais un autre document est lui facilement disponible. Il s’agit de son dossier dans la base Léonore, celle des membres de la Légion d’Honneur. A l’époque où il obtient cette distinction, il est capitaine de réserve dans le génie. L’historique militaire du dossier dit qu’il est sous lieutenant en 1920, ce qui laisse penser qu’il a finit la guerre avec le grade immédiatement inférieur. Il rapporte aussi deux citations attribuées à ce « jeune sous officier très allant et très énergique ». Etait-ce suffisant pour justifier la Légion d’Honneur en 1950 ?

Il faudra tout de même que je le décide à aller à Vincennes… A moins que les archives de Paris me prennent de vitesse.

I comme Ils sont revenus

Passons à un autre exemple, le frère de ma grand-mère paternelle, Francis(1) Lassère. Il paraît que je l’ai rencontré, mais j’étais trop jeune pour en avoir gardé le souvenir. Il a vécu loin de sa région natale, et était fixé à Lyon depuis les années 30, autant dire dans un autre monde. Mais lui, son dossier militaire est accessible. En revanche, celui de la base Leonore ne l’est pas. Car lui aussi a reçu la Légion d’Honneur : c’est indiqué sur sa fiche matricule, en 1960, mais il faudra attendre encore pour que la base Leonore le référence, en raison du délai de 50 ans. Dommage, on aurait su si la décoration était liée à sa guerre, qui fut plus qu’honorable : né en 1895, il n’est pas encore mobilisable lors de la déclaration de guerre et s’engage. Il la finira sous officier, maréchal des logis chef dans la réserve, après une blessure et une citation. D'ailleurs, lui aussi vaudrait la peine d'être étudié: d'après ce que j'ai entendu dire, il a commencé comme porteur de briques pour finir directeur de société. Un parcours difficilement envisageable de nos jours. Mais peut-être, un jour ou l'autre, l'un de ces lointains cousins que je ne connais pas aura-t-il l'idée de bâtir un arbre généalogique.

J’ai décidé d’en rester aux grands-oncles, et donc ce sera tout. Ma grand-mère maternelle n’avait pas de frère, et mon grand-père maternel était lui l’aîné : né en 1899, il appartenait à la classe 1919, j’y reviendrai.

Les parcours de ces trois grands-oncles ne sont pas tout à fait typiques, ni représentatifs de ceux des poilus qui sont revenus de la guerre. Chacun d’eux mériterait sans doute une étude plus approfondie : ce n’était pas mon propos aujourd’hui, je voulais seulement, en me limitant aux plus proches par le lien familial, évoquer ces millions d’hommes dont les noms ne figurent pas sur les monuments aux morts, mais qu’on ne doit pour autant pas oublier.

 

  1. Il est appelé "François" sur sa fiche matricule et dans tous les évènements militaires qui y sont notés. Cependant, il est bien "Francis" sur son acte de naissance à Flines. Et c'est ainsi que j'ai toujours entendu parler de lui.

Publié dans 14-18, ChallengeAZ, Généalogie

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